On dit que les histoires commencent toujours ainsi … Once upon a time. Généralement, malgré les péripéties, celles-ci se terminent toujours avec une happy end.
« Félicitation ! C'est une fille ! », déclara la sage femme, à mes parents. Ils avaient voulu garder le mystère jusqu'à la dernière seconde. C'était juste histoire de pouvoir se chamailler un peu sur le choix des prénoms. Je crois qu'ils auraient été capable de me prénommé Jésus si j'avais trop tardé à venir. Heureusement pour moi, ce ne fut pas le cas. C'est ainsi que je commençais mon entrée dans le monde, en comblant de bonheur mes parents. Cependant, cela n'eus pas l'air d'enchanter mes frères, et ils me l'ont fait sentir pendant les dix premières années de ma vie. « Bralleth ! Joue avec moi. », lui demandais-je sans cesse. J'avais toujours la même réponse, un regard noir et un rire, avant qu'il ne quitte la pièce. J'étais affectée par ce manque d'affection. J'étais une petite fille, et eux, deux garçons, ils me traitaient comme une paria. « Esfyr, va mettre un gilet, nous partons. », m'avais annoncer ma mère. J'avais dix ans, et en ce dimanche, nous partions en famille près d'une rivière pour pique-niquer. « On joue à cache-cache ? », demanda Bralleth, à mon autre frère. Ce dernier sourit et se tourna vers moi. « Tu viens Esfyr ? ». J'eus un large sourire, ignorant la grimace de Bralleth. Je ne me le fis pas dire deux fois avant de suivre mes frères. Bralleth commença à compter. « 1 ... 2 ... 3 ... », et je courus me cacher derrière un arbre, près de la rivière. Il s'arrêta de compter, je me collais à l'arbre en me décalant d'un pas. Un pas de trop, mon pied glissa et je me retrouvais dans l'eau. Je crachotais, ayant bu la tasse dans ma chute. « BRALLETH! », criais-je, lorsque je sens que le courant m'emporte loin de la berge. Je bats des bras et des pieds comme je peux, hurlant le nom de mon frère aussi fort que je le peux. Mais personne ne viens. « BRALLETH! », fut mon dernier cri, avant de me sentir partir, mon corps s'engourdir et ma vue se brouillée. Je sombrais alors dans l'inconscience, persuadée que ma dernière heure était venue. Je n'entendais plus, je ne sentais plus l'eau sur ma peau, ni mes vêtements collés contre mon corps, pas même le froid qui m'avait envahi, juste avant de perdre connaissance. Comme si mon esprit et mon corps étaient déconnectés. Pourtant, si je vous conte cette histoire, c'est que vous vous en doutez … je m'en suis sortie. Bralleth est venu a mon secours, lui qui avait cru à une mauvaise blague de ma part, encore une idée saugrenue pour pouvoir attiré son attention, comme je l'avais si souvent fait par le passé. Plongeant depuis la berge, pour nager tant bien que mal pour rattraper mon corps flottant, inerte dans la rivière. Il n'a pas hésité une seconde. Il m'a ramené sur la terre ferme, et mon autre frère avait alerté mes parents.  « Esfyr, je suis désolé, s'il te plait, ne me laisse pas ! », ne cessait-il de répéter, son visage au dessus du mien, alors que j'étais allongée dans l'herbe. Mais, je ne l'entendais pas, je ne pouvais pas. Ni une, ni deux, mon père m'a conduite à Ste Mangouste. Ma mère ramena mes frères à la maison, et je me suis réveillée dans une chambre à la luminosité aveuglante. Désorientée, je m'étais redressée dans ma couche, mon regard circulant dans la chambre.  « Père ! Mère ! », appelais-je, en commençant à pleurer. Je ne savais pas où j'étais, je n'avais jamais mis les pieds à Ste Mangouste. La porte s'ouvrit, claquant contre le mur, me laissant apercevoir mon paternel se précipiter vers moi, avant qu'il ne me prenne dans ses bras.  « Tu nous a fait tellement peur !  », me chuchota t-il à l'oreille, j'eus l'impression qu'il allait se mettre à pleurer, mais il n'en fit rien. Le lendemain, nous retournions à la maison. Contrairement à mes attentes d'indifférence habituelle de mon frère, ce fut celui qui m'accueillis en premier en me prenant entre ses bras. Chose qui m'avait toujours été refusé jusqu'alors. Je restais figée quelques instants, ne comprenant pas sa réaction. J'avais déjà du mal à tenir sur mes jambes, son étreinte avait fait que je m'étais cramponner à lui par simple réflexe.  « Je suis désolé Esfyr, je t'ai entendue mais j'ai cru que tu en faisais exprès. Pardonne-moi, petite soeur. », m'avoua t-il au creux de l'oreille. Je fronçais les sourcils en agitant ma tête de droite à gauche, contre son épaule. Il le prit comme un geste de refus, et s'écarta un peu de moi, le visage fermé.  « Si tu ne me pardonne pas, je ferais tout pour me racheter. », asséna t-il, durement. Un léger sourire se dessina sur mes lèvres.  « Je ne peux pas t'en vouloir, tu est mon grand frère. », lui répondis-je dans un souffle avant que ma mère ne m'entraine dans ma chambre pour que je me repose. Je tournais la tête une dernière fois, vers Bralleth et je le vis sourire. Sourire que je lui rendis.



J'ai grandi, Bralleth est devenu protecteur. Mon seul problème a présent, la soirée mondaine à laquelle j'allais participer ce soir. Je déglutis avec peine devant mon reflet dans le miroir. Ma mère m'avait dispensé des tonnes de leçons pour bien me conduire en société, dont porter des talons. J'avais beaucoup de mal à me tenir droite, et du haut de mes quinze ans, je ne rêvais que d'une chose rester bien cachée en dessous ma couette, bien au fond de mon lit. Et bien que ma mère se montrait encourageante, je me tordais la cheville une bonne dizaine de fois, avant d'arriver au lieu de la réception. Mes parents arboraient déjà leur visage habituel, les Everdeen toujours très élégants et raffinés. J'avalais la boule qui obstruait ma gorge, toutes les mondanités n'étaient pas pour moi. D'habitude, Khôl (mon cousin) était toujours à mes côtés pour me détendre et m'entraîner dans ses idées loufoques. Tout les deux, nous étions dans notre bulle, critiquant sans vergogne les invités présents et dévorant les petits fours servis. Malheureusement pour moi, ce soir, il n'était pas présent. Au grand soulagement de mes parents et à mon plus désarroi. Bralleth, lui, n'était pas très souriant. Le visage fermé, il fixait sans cesse le fils des Lysaght, Eothain, accompagné de son esclave sans doute. A la lueur de son regard, je le devinais. Je devinais son identité, pour le nombre de fois où il m'en avait parlé. Isÿe. Elle semblait avoir une conversation plus qu'animée avec son maître. Animée, venimeuse. Je les regardais à mon tour, curieuse et intimidée. J'aurais voulu aller voir ce petit bout de femme, à qui mon frère tenait tant. Elle semblait tellement intouchable, même par son maitre. Inaccessible. Je n'avais pas d'esclave, on m'en avait souvent parlé pendant les repas de familles. Cela avait fait rire Khôl. Moi, pas. J'avais toujours fait une comédie infernale à mon paternel pour ne pas en avoir. Je ne voulais pas devenir une tortionnaire, ni même être maitre de quelqu'un. Personne ne peut posséder personne. J'étais comme ça, à la fierté de mes parents en privé, à leur plus grand damne en public. Je fus interrompu dans le cours de mes pensées par un homme d'au moins l'âge de mes parents. Je ne le connaissais pas, du moins, je ne connaissais pas son nom. Il afficha un sourire, que je ne savais pas comment qualifier. M'invitant à danser avec galanterie. Je prenais mon courage à deux mains, en me répétant comme un mantra : je ne vais pas tomber, je ne vais pas me ridiculiser. Je ne vais pas tomber, je ne vais pas me ridiculiser. J'attrapais le bras qu'il m'offrait pour me diriger vers la piste de danse, d'un pas hésitant. Il me servit un discours de base, me complimentant sur ma tenue, parlant de ma famille … Je me contentais de répondre de ci, de là. Je me concentrais plus sur mes pas, qu'autre chose. Mais à force de me concentrer sur cela, je fis une boulette. Rien de bien grave pour n'importe qui, un incident diplomatique pour le gratin de la société, présente. Mon pied atterri sur celui de mon partenaire, honteuse, je me répandais en excuse, cherchant un soutien du regard. Ce soutien, je l'eus grâce à Isÿe.  « Monsieur s'il vous plait calmez-vous. Ce n'est qu'un petit incident ! », dit-elle à la personne en face de moi. J'ai cru que ce dernier aller s'étouffer de colère et d'incompréhension. Elle m'entraina par le bras, alors que l'autre vociférait dans la salle, recueillant le regard étonné des invités. Moi, je me cachais tant bien que mal derrière ma mèche de cheveux. Une fois à l'extérieur, je soufflais bruyamment, avant de tourner le regard vers ma sauveuse.  « Merci beaucoup, je ne sais pas ce que j'aurais fait si ... », lui dis-je timidement. Je n'aimais pas quand j'étais le centre de l'attention et là, j'avais été servie de chez servie.  « Ce vieux grincheux est toujours odieux avec tout le monde. », me dit-elle avec un sourire malicieux. Je lui retournais avec plaisir, je comprenais pourquoi Bralleth m'en avais si souvent parler. Indépendante – ou presque -, forte et intelligente. Son portrait avait été fidèle à la jeune femme que j'avais en face de moi.  « Je m'appelle Esfyr Everdeen, au fait. », repris-je en lui tendant la main. Elle la fixa quelques secondes avant de la serrer.  « Je sais, tu est le portrait de tes parents et de Bralleth. », me répondit-elle, en riant légèrement. Je me sens un peu ridicule sur le coup, bien sûr que Bralleth avait dû lui parler de moi, en bien ou en mal, mais il avait dû le faire. Je soupirais doucement avant de relever les yeux vers elle.  « Je suppose que tu est Isÿe. », lançais-je. Elle hocha la tête en guise de réponse positive. C'est ainsi que je rencontrais celle qui est devenu à présent une seconde maman pour moi. Elle me chouchoute, surveille les garçons qui me tournent autour. Une seconde Bralleth aussi quoi. Entre eux deux et Khôl, je suis verni !




 « Non, non, non, je refuse. Père vous savez très bien ce que j'en pense ! », hurlais-je à travers la maisonnée. Mon père avait eu l'idée de partir au marché des esclaves, pour en acquérir un. Pour moi. Pour ma sécurité. C'en était risible, j'avais bien survécu les dix-huit premières années de ma vie, je n'avais pas besoin de protection !  « Dis-lui toi ! Bralleth ! », m'énervais-je en désignant mon frère, qui haussa les épaules et fronça les sourcils. Il avait la même expression qu'une personne pris au dépourvu.  « Ton frère est d'accord avec moi. Nous en avons parler tout les deux. », asséna mon paternel. Je fronçais les sourcils à mon tour et pris cette décision comme une trahison pure et dure, de la part de ma famille qui connaissait pourtant mon opinion depuis bien longtemps déjà. Je partis d'un pas rageur dans ma chambre, claquant la porte. Il était hors de question qu'en plus j'accompagne les deux lascars dans leur choix de mon garde du corps ! Je passais la journée enfermée dans la même pièce, ressassant rageusement les paroles de mon paternel. J'entendis la porte se claquée à une heure tardive, mais je fis la sourde oreille et verrouillais la porte de ma chambre, dans l'espoir que mon père ou Bralleth renonce à me présenter mon esclave. La poignée s'actionna, et on toqua l'instant d'après. [color=cornflowerblue « Esfyr ouvre, s'il te plait. »[/color], demanda Bralleth. Je ne répondis pas, en attendant patiemment qu'il s'en aille et jette l'éponge.  « Tu ne pourra pas l'éviter éternellement. », dit-il avant de partir. J'entendis ses pas dans l'escalier et m'endormis en serrant mon oreiller entre mes bras. Je savais qu'il avait raison. Et la réalité me rattrapa alors que je sortais pour me rendre sur le chemin de traverse. Je ne connaissais pas le visage de l'esclave, mais je sentais une présence derrière mon dos. Mais dés lors que je me retournais, il n'y avais personne. J'accélérais le pas, avant de disparaître dans une allée sombre, quelques instants plus tard, un jeune homme blond, à la carrure imposante déboula. C'est là, que pour la première fois, je le voyais. Mon esclave, Aleksei. Il s'arrêta à quelques pas de moi, et je le dévisageais avec appréhension. Il avait le visage sombre et mystérieux, les yeux de quelqu'un de pas tellement fréquentable. Une véritable armoire à glace, Bralleth et mon père avaient-ils perdus la tête ?  « Arrêtez de me suivre, s'il vous plait. », lui demandais-je avant de passer à côté de lui avant de reprendre le chemin que j'avais voulu prendre auparavant. Il se saisi de mon bras, d'un poigne ferme et je relevais le regard vers lui. « C'est pour vous protéger Miss Everdeen. », asséna t-il durement. Il m'avait happé de son regard, j'avais l'impression de m'enfoncer dans de sombres abysses.  « Quel est votre nom ? ». « Aleksei ». « Bien, ne m'appelez plus Miss Everdeen. Esfyr c'est mieux. Accompagnez-moi plutôt que me suivre, c'est beaucoup moins flippant d'accord. », me résignant à la fatalité. Quoi que je dise quoi que je fasse, il serait là pour me rappeler qu'il était mon esclave.